Mesures

Casques, fusils, légitime défense... Les réponses de Cazeneuve à la colère des policiers

Le ministre de l'Intérieur a annoncé plusieurs mesures destinées à calmer la fronde menée depuis plusieurs semaines par les policiers. Si certaines ne sont que matérielles, d'autres, comme un nouveau texte sur la légitime défense, apparaissent bien plus polémiques.
par Willy Le Devin
publié le 26 octobre 2016 à 19h47

L'annonce devait intervenir courant novembre. Mais le vigoureux mouvement de contestation des policiers a obligé le ministère de l'Intérieur à anticiper. Depuis l'Elysée, après une entrevue au plus haut niveau de l'Etat avec les organisations syndicales, Bernard Cazeneuve a détaillé, mercredi soir, un vaste plan d'investissements, dont certains entreront en vigueur très prochainement. Le locataire de Beauvau a notamment œuvré pour obtenir une hausse des crédits de son ministère de 15% dans le projet de loi de finances 2017 – ce qui représente 843 millions d'euros.

Dans cette enveloppe, environ 250 millions d'euros iront à l'achat de matériels et à la modernisation des locaux de la police et de la gendarmerie. Ainsi, quelque 8 000 casques à visière renforcée, 21 700 gilets par balles porte plaques (c'est-à-dire avec de la céramique) 4 730 boucliers et 440 fusils d'assaut HK G36 vont être distribués à compter du 1erjanvier. Parallèlement, la place Beauvau lancera des travaux dans les commissariats et les gendarmeries les plus vétustes. «Nous avons conscience de l'obsolescence de certains outils et du mobilier déplorable dans certains locaux, notamment parisiens», insiste une source ministérielle. Pour diminuer la pression sur les effectifs, le ministère de l'Interieur a sanctuarisé plusieurs centaines de milliers d'euros pour embaucher des agents de sécurité et, par là même, mettre fin aux gardes statiques devant les préfectures et les tribunaux. De ce fait, 221 équivalents temps plein (ETP) vont être redéployés auprès de la population.

Voilà pour les chiffres. Mais puisqu'il n'est pas certain que les bons comptes fassent les bons amis, le ministère de l'Intérieur a cédé à d'autres doléances syndicales. Bernard Cazeneuve a en effet annoncé qu'il souhaitait que le régime juridique de l'outrage à l'égard d'un policier ou d'un gendarme soit aligné sur celui de l'outrage à magistrat. La peine encourue irait ainsi jusqu'à un an de prison et 15 000 euros d'amende. Dans certaines affaires sensibles, le ministre désire également que les services enquêteurs bénéficient plus largement de l'anonymisation dans les procédures – un «privilège» jusqu'ici réservé aux sections de lutte antiterroriste et aux unités d'intervention.

Légitime défense

Bien plus polémique, Bernard Cazeneuve a rouvert le sempiternel débat autour des conditions de recours à la légitime défense pour les policiers. En concertation avec les syndicats et le ministère de la Justice, Beauvau envisage de rapprocher plus encore le régime juridique des policiers de celui des gendarmes. Un pas avait déjà été effectué dans le projet de réforme pénale adopté le 26 mai par le Parlement. Ce dernier prévoyait un assouplissement des règles d'ouverture du feu, dans les cas où les forces de l'ordre feraient face à une action meurtrière. Mais l'agression de quatre policiers au cocktail molotov à Viry-Châtillon (Essonne) le 8 octobre a remis une pièce supplémentaire dans la machine. En coulisses, la Chancellerie fait toutefois savoir qu'elle n'est pas du tout favorable à la rédaction d'un nouveau texte.

Enfin, pour améliorer la communication entre policiers et magistrats, le gouvernement va réfléchir à la mise en place d’un système informatique d’échanges d’informations. Il permettra aux policiers de connaître les poursuites retenues à l’encontre des personnes interpellées. Là encore, il s’agit d’un vieux serpent de mer, dont les modalités restent à préciser.

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